Je Selfie donc je suis, quelles conséquences pour le commerce ?

En lançant des rencontres mensuelles, la Chaire E.Leclerc et ESCP souhaitent créer un nouveau lieu de débat pour encourager les étudiants et les professionnels dans leurs recherches et alimenter la communauté d’une réflexion innovante sur l’évolution du commerce et l’impact des nouvelles technologies sur le secteur. 

Le petit-déjeuner du 7 décembre 2016

Animé par Michel Edouard Leclerc et le Professeur Olivier Badot, Doyen à ESCP, ce premier petit-déjeuner, qui a réuni plus de 100 participants, avait pour thème : « Je selfie donc je suis », avec la participation d’Elsa Godart, Docteur en psychologie et Docteur en philosophie et de Maxime Valette, multi-entrepreneur dans la nouvelle économie. 

Garder ses valeurs commerciales dans un monde enclin à de profondes mutations. 

Aujourd’hui les marques sont dans un rapport entre l’affect, l’attachement qu’elles suscitent  par différents canaux et les technologies. Plus que jamais, dans ce monde en profonde mutation, décisionnaires, enseignes et marques  doivent faire la part de recul par rapport au contexte ambiant pour ne pas perdre son temps et se disperser dans le foisonnement de révolutions annoncées tout en trouvant leurs propres voies. Pour que dans le rapport entre les technologies et la société les marques puissent agir de façon concrète et pérenne. La Chaire « Prospective du Commerce dans la société 4.0. » tend ainsi à travailler sur l’impact à la fois sociétal et social de ces mutations. 

« Je selfie donc je suis » : la place du selfie dans la société et dans le commerce de demain. 

Le commerce de demain, 4.0 est plus complexe car il comporte un nombre important d’acteurs aussi bien d’un point de vue de l’économie industrielle que de l’économie organisationnelle. 

Maxime Valette a créé sa première entreprise à 15 ans dans l’hébergement de sites web et plus tard un blog, « Vie De Merde » devenu un site participatif qui compte aujourd’hui plus de 3 millions de visites / jour, chiffre d’affaires de 2 millions d’euros pour une dizaine de salariés. Selon lui, dans l’évolution du web, le 3.0 fut le web qui a permis la participation, la création de réseaux et a participé à l’acte d’achat et même à évaluer les magasins avec des sites comme Fia-Net. La communauté devient active dans ses achats et c’est un phénomène de participation sur lequel il faut continuer à se développer.

Aujourd’hui on voit l’émergence d’une nouvelle tendance, issue de la saturation de la « bande passante humaine » : le web 4.0 – C’est le web qui va venir à l’utilisateur et non plus l’inverse. Ca va être les objets du quotidien qui vont faciliter l’achat. Et cette tendance est d’autant plus fondamentale qu’aujourd’hui, dans une grande partie des achats, ce qui stimule l’acte d’achat est la connexion de l’objet à internet. 

Il y a un retour au self-challenge, cela rejoint le phénomène des Selfies. Il y a une constatation de l’essor du cross-canal, qui signifie que l’existence virtuelle est systématiquement perçue comme l’expérience de commerce vertical. 

Le web permet aujourd’hui de vendre sur des secteurs qui sont très affinés et les parts de marché sur un petit nombre de client sont très importantes. Enfin, dernière étape, les évolutions technologiques vont apporter une reconnaissance aux utilisateurs qui vont pouvoir s’exprimer et exister différemment sur le web 4.0 et cette nouvelle valeur ajoutée aura une valeur financière, commerciale puisque l’on sera en mesure de vendre quelque chose qui est directement créé par l’utilisateur. Ce sont ainsi tous ces petits métiers qui sont en train de se développer et qui vont faire le commerce de demain. Nous pouvons donc souligner l’intérêt à la fois financier, même s’il est minime dans un premier temps, car cela amène à des reconversions professionnelles « sans stress » et cela a aussi un intérêt pour l’utilisateur qui va pouvoir se reconnecter avec son prestataire de service qui est un peu son reflet. Cela se traduit par des particuliers qui vont directement proposer leurs propres services, chose qui n’existait pas auparavant. Ces micro-services ne tuent pas nécessairement des emplois. Les villes adoptent de plus en plus le modèle de « Shoreditch » du nom de ce quartier londonien où les personnes travaillent, mais n’importe où, c’est l’apothéose du télétravail. 

En Angleterre, 90% des sociétés de services ont une personne en télétravail. En France seulement 2%, ce qui démontre qu’une marge de progression est possible en France. 

De plus, des plateforme comme 5€.com proposent des services à partir de 5€ alors que le panier moyen et de 3x cette somme. Résultat, les personnes ont tendance à accepter plus cher un service lorsqu’ils savent que celui-ci retombe directement dans la poche de la personne. Cela favorise également l’économie de partage tout en rappelant que sur internet la création de business ne se fait pas sans la création de communautés.   

Pour Elsa Godart, le Selfie révèle de nombreuses choses car il est le catalyseur d’une tendance bien réelle et beaucoup plus complexe qu’elle n’y paraît. Révolution ? Mutation ? Elle propose plutôt le mot métamorphose. La métamorphose fait appel à un changement de forme. Le commerce évolue en même temps que la relation à l’autre, et ce aujourd’hui, par l’intermédiaire du Selfie. Ainsi il est quasiment impossible de se séparer actuellement d’un objet aussi singulier qu’est le téléphone, cela a donc créé une nouvelle manière d’envisager le monde et ainsi une nouvelle façon de créer du lien et d’interpréter le commerce. Le Selfie est donc la métamorphose de l’inter-subjectivité. Né en 2002 sur un forum Australien, le Selfie renvoie au self-soi et le suffixe « ie » qui le rend plus affectueux aujourd’hui c’est un terme enraciné dans les langues mais c’est surtout un comportement qui est révélateur d’une hyper modernité. Le Selfie aujourd’hui existe car il a vocation à être partagé grâce à internet. Ce phénomène démontre la puissance écranique, qui est la puissance des écrans. 

Et le commerce a très bien intégré cette puissance puisque il est désormais possible de payer sur certains sites avec un Selfie. Technologie et humain se confondent dans un tout, qui sera à l’image du commerce de demain. 

A Michel-Edouard Leclerc de conclure ainsi : « ces petits déjeuners, menés avec ESCP, autour d’un invité principal, vont nous permettre de partir de ces novations, de ces nouveaux repères pour analyser en profondeur quels vont être les éléments de demain qui vont être impactant sur nos métiers et utiles socialement ».

Et à Olivier Badot, Directeur scientifique de la Chaire de soutenir : « organisée en trois piliers, la Chaire regroupe une production Doctorale, pour modéliser l’économie industrielle et organisationnelle du commerce de demain qui s’avère être très complexe et multi-acteurs. Mais aussi un volet enseignement sur la distribution et le commerce 4.0 pour les étudiants inscrits afin de produire de la recherche et surtout de susciter des vocations. Et enfin une volonté de transfert qui consiste à faire part de ce que la Chaire fait à l’ensemble de la communauté professionnelle, académique, de chercheurs et des pouvoirs publics »

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