Tous les ans, la Chaire Mode et Technologie lance un appel à projets auprès des étudiants de ESCP et de l’Université catholique portugaise pour une mission de conseil.

4 étudiants sont sélectionnés (2 par écoles) pour collaborer pendant 6 semaines avec les équipes opérationnelles de Lectra. Cette année, Christopher Teixeira Dos Santos, Xiangyu Quan, Maria Teresa Carneiro et Costa Sousa Cardoso et Stefanie Krowinnus ont apporté des éléments de réponses à la question : "Comment l’industrie 4.0 modifie-t-elle la relation entre les donneurs d’ordres et les sous-traitants dans l’industrie de la mode ?"

Entre juin et juillet, l'équipe a interrogé des professionnels du secteur textile, mode et habillement dans 7 pays (Allemagne, Portugal, France, Chine, Italie, Royaume-Uni et États-Unis). Leur résultats s'appuient sur les rapports gouvernementaux, les initiatives de l'industrie 4.0 de chaque pays et les sites Euromonitor et Statista.

Quelle définition pour le terme "Industrie 4.0" ?

Il n’existe pas une définition simple et unique de l’industrie 4.0. On peut dire que "l'industrie 4.0 se manifeste principalement par une numérisation et une interconnexion croissantes des processus de fabrication, des produits, des chaînes de valeur et des modèles économiques. L'interconnexion entre mondes physique et virtuel est une caractéristique centrale", L.M. Camarinha Matos, R. Fornasiero et H. Afsarmanesh (Collaboration in a Data-Rich World: 18th IFIP WG 5.5 Working Conference on Virtual Enterprises, PRO-VE 2017, Vicenza, Italy, September 18-20, 2017, Proceedings).

Au-delà de cette interprétation, le concept d'industrie 4.0 revêt une signification différente en fonction des acteurs opérant dans l’industrie de la mode. Pour les marques, i4.0 signifie maîtrise poussée des données client; pour les fabricants : rapidité et agilité ; pour les détaillants : cela renvoie aux stratégies de distribution multicanales ; pour les consommateurs, i4.0 cela se traduit par des produits encore plus adaptés à leurs attentes et à leurs habitudes.

Des technologies façonnant l'avenir

L’Internet des Objets (IoT), le Cloud computing et l’intelligence artificielle sont les trois catalyseurs technologiques qui rendent la chaîne de valeur reliant marques et sous-traitants plus intelligente et plus connectée.

  • L’IoT gère la collecte et le traitement d'énormes quantités de données diverses et variées, comme le suivi des stocks ou les préférences du consommateur.
  • Ces quantités massives de données générées de manière exponentielle se retrouvent stockées dans le Cloud : c’est le Big Data.
  • Ces données en masse méthodiquement exploitées et analysées vont permettre d’enrichir et de constamment améliorer des processus industriels en boucles itératives de plus en plus systématiques et de plus en plus adaptées : c’est l’ IA ou l’Intelligence Artificielle (machine learning et circular learning). 

La nouvelle chaîne de valeur à l'ère de l'i4.0

A l’heure où la rapidité est reine et où le consommateur est roi, c’est toute la chaîne de valeur qui doit se moderniser pour maintenir un avantage concurrentiel durable. Comment ? 
Tandis que le modèle traditionnel de la chaîne de valeur est construit autour d’une collaboration et d’une intégration linéaires, i4.0 prône le passage à des prestations de valeur non linéaires et purement collaboratives. Comment ? Grâce au circular learning (apprentissage en boucles itératives). 
Le modèle du circular learning permet d’implémenter des boucles de rétroaction à l’ensemble de la chaine de valeur, dotant chaque étape d’un cercle d’apprentissage spécifique. Au cœur du système, l’intelligence artificielle encadre tous les cercles pour accélérer les flux de données et les rendre non-linéaires, les données pouvant sauter des étapes dans la chaîne de valeur. 
Les avantages de ce modèle seront principalement axés sur les métriques, l'exécution opérationnelle, la planification tactique et la collaboration stratégique.

Trois facteurs de transformation de la relation donneurs d’ordres / sous-traitants

Un renforcement de la collaboration est essentiel si l’on veut évoluer vers des systèmes véritablement intégrés, pour évoluer vers l'industrie 4.0. Or aujourd’hui, les relations entre marques et sous-traitants sont impersonnelles et linéaires. Une série d’entretiens avec des experts de l’industrie de la mode a permis de conclure à trois scénarii d’évolution possibles :

1. La co-création : Les sous-traitants très spécialisés (ex: textiles techniques) peuvent s’allier avec des marques innovantes et avant-gardistes co-créer et co-construire de nouvelles solutions technologiques.

2. Les tech moguls : De nouveaux acteurs technologiques interviennent pour satisfaire ces besoins de liaison et d'intermédiation entre les sous-traitants et les chaînes de valeur de la marque.

3. L’hybridation : Les fabricants de mode qui opèrent sur de gros marchés peuvent se lancer dans des stratégies de diversification organique ou d’acquisition. Se différencier horizontalement dans des domaines technologiques permet de diffuser cette technologie à travers toute la chaine de valeur.

 

Le choix d’un scénario plutôt qu’un autre dépendra des caractéristiques et de l’état d’évolution de l’industrie localement : taille, utilisation des technologies, intégration verticale, degré de proximité entre marques et sous-traitants et enfin ADN, innovateur, primo adoptant ou suiveur. 
 

 

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