L’usine du futur, Made in France !

Au coeur de la dialectique sur l’application des nouvelles technologies aux filières de la mode et du luxe, la Chaire Lectra - ESCP Mode et Technologie a assisté à plusieurs rencontres sur Made in France Première Vision, le salon de la haute fabrication de mode française, qui s’est tenu les 28 et 29 mars derniers au Carreau du Temple à Paris.

Dans le cadre de sa veille sur l’industrie 4.0 et les nouvelles façons d’organiser les moyens de fabrication et de production du textile habillement, la Chaire Lectra - ESCP a accordé une attention particulière à la rencontre Next, le r3ilab au service de l’usine du futur, l’une des tables-rondes organisées en partenariat avec l’IFM

NEXT est le dernier programme prospectif mis au point par le r3ilab, qui a réuni pendant 9 mois des marques et des industriels pour mettre en place des process innovants, adaptés au fonctionnement industriel. Plusieurs questions étaient à la base de chaque projet, auxquelles les participants au programme ont trouvé des solutions :

Comment faciliter la conception de produits textiles sur-mesure ?

1083 est une marque de prêt- à-porter éthique et équitable qui a lancé les premiers jeans entièrement teints, tissés, délavés et confectionnés en France. La solution Style and Fit de Neatek a été intégrée dans la chaîne de conception des jeans. C’est une application digitale qui personnalise et automatise l’édition du patronage pour le rendre directement exploitable en atelier et permet de développer plus facilement ce nouveau modèle de confection.

Comment optimiser un modèle de fabrication made in France ?

Pour maintenir son activité en France, Le Slip Français recherchait une solution pour abréger le processus de fabrication en réduisant le nombre d’étapes de confection. Les nouveaux procédés de découpe laser et de thermocollage apportés par Top Tex Cube ont considérablement réduit le nombre d’opérations et la durée de confection. Le produit phare, le boxer, nécessite avec la technique traditionnelle 9 pièces de patronage et 4,15 minutes d’assemblage. Avec la technique TopTex Cube, il n’y a que 3 pièces de patronage et moins de 3 minutes d’assemblage. Moins d’opérations, plus de capacités de production, avec un autre visage ! 

Comment valoriser les matières innovantes pour diversifier leurs applications marchés ?

Sericyne propose une nouvelle forme de production de la soie où les chenilles déposent leur soie sur des formes variées : une impression 3D naturelle pour une matière résistante et étincelante. Pour aller vers la décoration intérieure, l’entreprise avait besoin d’une solution antisalissure et de nettoyage rapide. Un ingénieur de l’IFTH a proposé plusieurs traitements de surface: un nouvel ennoblissement pour élargir la base clients.

Comment robotiser certaines opérations de manutention pour améliorer le service client ?

Union Textile de Tourcoing - UTT Yarns, en partenariat avec le fabricant allemand Schlafhorst, a mis au point un robot de déchargement et d’alimentation des métiers à rembobiner pour gagner en  flexibilité et proposer des séries plus courtes sur des coloris spécifiques à ses clients. Ce nouveau procédé a impliqué la réorganisation totale de l’atelier de finitions et de l’ensemble de gestion des flux avec la teinture.

Comment intégrer des déchets textile, habituellement non recyclés, dans une économie circulaire de production ?

LTC Les Tissages de Charlieu, spécialiste du tissage jacquard et acteur du développement durable reconnu, a initié le projet d’upcycling Everweave, pour lequel Chevalerin a créé une machine pour utiliser de façon industrielle la lisière et en faire une nouvelle matière à tisser. Chargeurs Fashion Technologies a ensuite appliqué un processus premium d’entoilage pour améliorer les qualités du tissu obtenu pour proposer des tissus haut-de-gamme à très forte personnalité pour l’ameublement et le prêt-à-porter. 

En conclusion, les intervenants ont porté leur regard sur la notion d’usine du futur

Pour Thomas Huriez, fondateur de 1083 : "Plus que l’usine du futur, il est question de la filière du futur, qui demain, doit répondre aux défis d’attractivité, d’économie circulaire et de proximité.  L’industrie du futur est celle qui recrute sans difficultés et c’est une question qui suscite de nombreuses préoccupations actuellement. Les industries doivent se remettre en cause, réaménager le cadre de travail et aller au-delà de la monotâche. Lors de nos portes ouvertes à Romans, le public s’émerveille de l’atelier et des métiers exercés. Or, les écoles font rêver les étudiants sur le stylisme et assènent que la confection, c’est la déception mais dans la réalité, le métier de styliste peut être bien moins épanouissant que celui des ateliers".

"L’industrie textile est perçue comme le parent pauvre de l’industrie en générale", explique Laurent Noca, DG de TopTex Cube. "Il est nécessaire de collaborer différemment sur les projets, d’adapter la production, la communication et de revoir la chaîne de production".

Pour Eric Boel, PDG des Tissages de Charlieu, "Il est fondamental de former les équipes, de libérer du temps pour que les salariés puissent développer leur projets à partir de toutes les technologies innovantes qui sont mises à leur disposition. Il faut faire de cette initiative personnelle et de cette autonomie un atout gagnant". 

Pour Sylvie Chailloux, fondatrice de Textile du Maine, "Une PME ne peut pas innover seule. Lorsqu’une PME veut faire face à ces enjeux sans avoir le temps nécessaire ni les moyens, il faut une vraie volonté de la filière mode, à l’échelle nationale, de travailler ensemble. Et si la monotâche est un gage de productivité, il faut réfléchir à l’évolution vers la multitâches avec des outils adaptés pour maintenir et développer la capacité de production".

L’avis de Céline Chollet, chef de produits Le Slip Français : "L’entreprise travaille avec 42 ateliers différents et découvre de nouveaux artisans et de nouveaux ateliers tous les jours ! Il est grand temps de communiquer et dévoiler davantage ce domaine trop caché, trop secret !

Comme pour le r3ilab, l'industrie 4.0 est un sujet majeur pour la Chaire Lectra – ESCP, particulièrement dans les répercussions de ces technologies sur l'organisation de la chaine de valeur. Lectra a compris depuis longtemps que l'innovation et la technologie pouvait permettre de conserver l'outil industriel en France. La Chaire Lectra – ESCP organisera prochainement, le 6 juin 2018, une table-ronde sur l’usage des technologies 4.0, et particulièrement des réseaux sociaux, leur impact dans la transformation des business modèles de la mode et les implications en termes de stratégie marchés et de distribution.

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